le baiser

Fin d’année. J’ai réfléchi à quel article poster pour les fêtes. Lookbook tenues festives, tutoriel maquillage pailleté, diy cadeaux uniques. Fin d’année : qu’aurais-je donc à partager, quel petit bout de moi abandonner ici à la vue de tous ? J’ai réfléchi à quelque chose de singulier, du jamais vu, du spectaculaire pour rincer l’oeil à l’auditoire. Me déguiser en sapin de Noël et danser sous l’Arc de Triomphe, sauter du haut de la Tour Eiffel avec les rennes ailées du père Noël en guise de parachute. Mais comme je n’ai pas trouvé l’idée extraordinaire qui aurait pu propulser les statistiques des vues, par esprit de contradiction surtout, je me suis dit : allons à l’essentiel.

Et en rentrant à la maison, et en lisant horrifiée les titres des journaux berlinois, j’ai contemplé autour de moi la ville illuminée. Un peu comme quand je regarde cet iconique tableau de Klimt orné de mosaïque dorée, les lumières m’ont éblouies, fortes, intenses. Et j’ai trouvé mon idée incroyable et révolutionnaire, celle qui irradie et fait s’éclipser toutes les autres. the golden grounds: c’est trouver dans les racines terreuses l’or véritable, trouver dans l’authenticité et la pureté une forme d’idéal vers lequel tendre, qui brille loin devant moi. Depuis deux mois, je cultive ce jardin presque secret dans l’espoir de partager avec d’autres quelques moments suspendus. Et c’est cela, l’idée : juste partager un échange, un moment, une attention toute petite, minuscule.

C’est exactement cela les fêtes de fin d’année. Pause au milieu d’une vie tumultueuse, on souffle, serre entre nos bras les corps de ceux qui sont chers à nos coeurs. Recueillir leur poids, leur masse toute entière. Etreintes, baisers, tout cet amour qu’on ne s’avoue jamais, trop pudiques et gênés dans notre sensibilité, embarrassés. D’ordinaire on ne prend pas le recul pour s’en rendre compte, affairés par nos problèmes à résoudre, l’adrénaline des défis quotidiens qu’on s’efforce de relever et la vitesse vertigineuse des vies après lesquelles on court.

Aujourd’hui 24 décembre, il est temps de prendre le temps, il est temps de se complaire dans une contemplation presque béate de notre amour pour ceux qui nous entourent. Ca te parais risible, ridicule, ça l’est peut-être un peu, ce n’est pas mon style, ça ne me ressemble pas. Pourtant quand je regarde ce tableau de Klimt, moi aussi j’ai envie de voler un moment à ceux que j’aime et moi aussi j’ai envie qu’il devienne immortel, un souvenir qui ne me quittera jamais. Avant qu’il ne soit trop tard, il est temps de faire naître ce qui toute notre vie constituera nos plus cadeaux.

Nothing behind me, everything ahead of me, as is ever so on the road.
Rien derrière et tout devant, comme toujours sur la route.
jack kerouac, On The Road

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Bonnes fêtes

Amélie Zimmermann

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